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«L’intégration de l’enfant autiste nécessite une lourde prise en charge»

Le Matin : L'enfant autiste vit dans un monde à part. Peut-on savoir combien d'enfants souffrent de cette maladie au Maroc en général et à Fès en particulier ?Afaf Amarti :

Il n'existe pas de statistiques officielles au Maroc concernant le nombre d'enfants autistes ou l'incidence de cette maladie. Selon les estimations internationales 1/100 à 1/150 enfants seraient touchés par cette maladie ce qui revient à dire qu'il y a probablement plusieurs dizaines de milliers d'enfants autistes au Maroc. À Fès, il y a probablement plusieurs centaines d'enfants atteints d'autisme.

Qu'est-ce qui se fait pour sortir l'enfant autistede son monde ?

Toutes les études internationales ont permis de constater que le maintien des enfants autistes en milieu naturel, en optimisant au maximum leur environnement pour leur permettre de faire des apprentissages, est la meilleure façon de les prendre en charge. Cependant, ce serait une erreur de croire que l'intégration de l'enfant autiste se fera de façon spontanée. Elle nécessite une prise en charge lourde et continue de la part des parents et du personnel de soutien. De nombreuses méthodes éducatives sont en vogue dans le monde, en particulier les méthodes comportementales.

Où en est la recherche ?

La recherche scientifique a permis de confirmer que c'est une pathologie liée à des anomalies génétiques qui entravent le développement normal du système nerveux. Ces anomalies sont rarement héréditaires et surviennent de façon accidentelle lors du développement intra-utérin. Par ailleurs, beaucoup d'études ont essayé de confirmer le rôle des facteurs environnementaux dans la survenue de l'autisme, mais aucun facteur n'a été formellement incriminé.

Le gouvernement marocain s'est engagé à intégrer les enfants souffrant de handicaps dans le système scolaire. Est-ce le cas pour les enfants autistes ?

Des efforts ont été faits, mais sont totalement insuffisants. Les associations comme la nôtre peuvent, en partenariat avec les délégations du ministère de l'Éducation nationale, avoir à leur disposition des classes spéciales au sein des écoles primaires publiques, mais l'intégration d'enfants autistes avec un auxiliaire de vie dans les classes normales est toujours difficile. Par ailleurs, aucun effort n'a été fait concernant la production de programmes ou d'outils pédagogiques adéquats. Le mode d'apprentissage des enfants autistes est essentiellement visuel et notre association par exemple produit elle-même tous les supports pédagogiques dont les enfants ont besoin en classe spécialisée, ce qui demande énormément d'énergie et de moyens de la part de tous les intervenants.

Est ce qu'il y a des écoles spécialisées pour les enfants autistes à Fès, ou au Maroc en général ?

Il n'y a pas d'école spécialisée. D'ailleurs, il est préférable de garder les enfants autistes intégrés dans des écoles normales, même en partie. L'association Miroir gère 4 classes spécialisées au sein de 2 écoles primaires à Fès.

Est-ce qu'il y a assez d'éducateurs et d'éducatrices spécialisées dans l'autisme ?

Ceci est un grand problème dans notre pays, il n'existe pas de formation spécifique pour éducateurs spécialisés et les associations prennent en charge la totalité des frais inhérents à cette formation en invitant le plus souvent des formateurs étrangers.

Peut-on savoir ce qui se fait au niveau de l'association ?

L'association Miroir œuvre depuis 2004 pour le soutien des familles d'enfants autistes et leur prise en charge. Le nombre des enfants admis au sein de l'association s'est multiplié par 10 en 9 ans et nous assurons actuellement la prise en charge de près de 60 enfants. La difficulté de prise en charge en ce qui concerne l'autisme réside dans la nécessité d'intégrer les familles dans le processus éducatif. Chaque enfant est particulier par ses difficultés et ses capacités, si bien que des programmes individualisés sont établis pour chaque enfant et doivent prendre en considération les priorités d'apprentissage en matière d'autonomie, de socialisation, de communication et d'acquisitions cognitives. Pour tous les enfants de l'association, la coordination est également faite avec les équipes de neuropédiatrie, de pédopsychiatrie et de génétique qui les prennent en charge. L'association organise par ailleurs des actions caritatives pour avoir des fonds afin de prendre en charge la quasi-totalité des frais pour les enfants démunis et assurer le matériel pédagogique pour les classes et les ateliers. Notre projet phare est de constituer, en partenariat avec les professionnels, un réseau spécialisé de prise en charge des enfants autistes à Fès qui pourra également bénéficier à d'autres associations.

L'éducation d'un enfant autiste a un coût élevé, si on la compare à celle d'autres enfants. Comment les parents s'en sortent-ils ?

Les frais mensuels de prise en charge sont en effet d'environ 2 000 à 2 500 DH, car pour un apprentissage optimal, chaque enfant a un auxiliaire de vie qui s'en occupe exclusivement, ajoutons à cela les frais de thérapeutiques de support : rééducation, psychomotricité, réorganisation neurofonctionnelle, transport scolaire, frais d'inscription aux écoles privées pour les enfants intégrés, etc. L'association prend à sa charge de nombreux enfants démunis ou alors organise des actions de parrainage et de dons à cet effet. Elle prend également en charge tout le matériel éducatif : pictogrammes, audiovisuel, réorganisation neurofonctionnelle, jeux éducatifs, matériel de sport, équipement des classes...

Fournisseur / Source : Propos Recueillis Par Rachida Bami, Le Matin


Propos Recueillis Par Rachida Bami, Le Matin
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Le Matin (anciennement nommé Le Matin du Sahara et du Maghreb) est un quotidien marocain publié en français, présentant des actualités nationales et internationales ainsi que des informations pratiques. C'est le journal officieux du palais royal marocain.

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